128 km |
Collines |
Période permienne; la dernière partie de l'ère paléozoïque |
Après cinq jours de voyage dans le temps à travers le Bassin parisien, les coureurs s'enfoncent désormais dans les profondeurs rocheuses du massif vosgien. L’étape d'aujourd'hui amènera le peloton à travers des roches qui se sont déposées au cours de la période permienne, la dernière partie de l'ère paléozoïque, il y a entre 299 et 252 millions d'années. De toutes les périodes traversées par le Tour de France Femmes, le Permien fut probablement la moins hospitalière.
Une glacière du désert
Imaginez : vous traversez le vaste intérieur du supercontinent Pangée. Un Tour de Pangea vous amènerait de l'Antarctique à la Sibérie, et rien de tout cela n'aurait été une promenade de santé. En effet, le climat permien était froid et sec. Une vaste calotte glaciaire recouvrait l'Antarctique, l'Afrique australe, la majeure partie de l'Amérique du Sud et aussi la Sibérie. Dans la zone équatoriale, où les Vosges étaient situées pendant le Permien, le cœur de la Pangée était sec et vous vous retrouvez dans un Sahara “froid”, mais probablement encore désagréablement chaud. Presque partout en Europe et en Amérique du Nord, on trouve d'épais paquets de grès rouges du désert, formés en dunes ou en sabkhas. Mais dans les Vosges, où nous sommes aujourd'hui, le Permien était marqué par du volcanisme explosif. Sec, poussiéreux, explosif donc. Conditions terribles pour une balade à vélo.
Créatures du Permien - en sécurité dans le désert
Imaginez que vous tentiez une échappée dans cette étape et qu'après votre accélération vous vous retrouviez… tout seul. Dans des circonstances normales, cela serait déjà une journée difficile. Mais dans le Permien, vous regarderiez par-dessus votre épaule à chaque minute. Les forêts tropicales luxuriantes du Carbonifère ? Mort et enterré. Pas d'espoir d'abri là-bas, il faudra attendre l'étape de demain. Non, les terres sèches du Permien étaient occupées par des fougères et des conifères. Si vous vous étiez échappés dans le Carbonifère, les animaux terrestres que vous auriez trouvés seraient principalement des amphibiens : ils ont besoin d'eau pour pondre leurs œufs, donc le désert aurait été un endroit sûr pour vous. Mais à l'époque du Permien, l'évolution trouva un moyen de se reproduire dans des conditions terrestres extrêmes et les amniotes se développèrent. Les amniotes, qui incluent vous et moi, sont une classe d'organismes comprenant des oiseaux, des reptiles et des mammifères, qui ont développé une membrane autour de leurs œufs empêchant le dessèchement. Ainsi ces espèces étaient capables d’envahir et d’occuper des terres arides. Alors dans le désert Permien, mieux vaut se méfier du Dimetrodon, le prédateur suprême, long de plus de cinq mètres, avec une énorme voile sur le dos et des dents féroces.
La vie dans le Permien était aussi bonne pour les insectes ! Grâce aux forêts luxuriantes du Carbonifère, les niveaux d'oxygène étaient élevés et les insectes pouvaient devenir GROS. Est-ce un hélicoptère que vous entendez au-dessus de vous ? Non. C’est un Meganisopter, un ancêtre primitif des libellules, qui possède un corps de 47 cm et une envergure de 75 cm. S'ils commençaient à vous embêter, vous devriez sûrement accélérer...
A la fin de cette période difficile, c’était encore pire
La période froide du Permien s'est terminée par deux pics de réchauffement climatique. Une première, pas encore trop dévastatrice, s'est produite il y a environ 260 millions d'années, lorsque les basaltes d'Emeishan ont dévalé les pentes du sud de la Chine. Des épais tas de laves de plusieurs kilomètres d'épaisseur se sont déversés sur une superficie de 0,3 million de kilomètres carrés. Mais les “trapps” sibériens, il y a 252 millions d'années, ont été le dernier clou sur le cercueil. Ces laves ont couvert une superficie de 7 millions de kilomètres carrés, ont provoqué un doublement du CO2 atmosphérique et d'autres gaz à effet de serre, et une augmentation de la température mondiale pouvant atteindre jusqu’à 5°C. Les laves sibériennes traversèrent d'épaisses couches de sel, et produirent des gaz ayant potentiellement détruit une grande partie de la couche d'ozone de l’époque. Le résultat? 95% de toutes les espèces marines disparurent, y compris les trilobites qui parcouraient l'océan depuis près de 300 millions d'années. 70% de toute la vie terrestre a péri, y compris les insectes. C’est à ce jour, la seule extinction massive d'insectes connue. Après cet épisode destructeur, il faudra 30 millions d'années à la vie pour s'en remettre. Vous voudrez peut-être appuyer un peu plus fort sur vos pédales pour en finir avec cette étape !
I’m a junior geologist studying plate tectonics and their link with paleogeography. I go an ask the rocks directly on the field, study the structures then take some sample home for paleomagnetism analyses and geochronology.
Leny Montheil
I am a geologist and I study plate tectonics and the driving mechanisms in the Earth’s mantle, mountain building processes, and the geography of the geological past. I enjoy geological fieldworks all over the world, and translating the results to science and a broad public. Check our complete team.
Douwe van Hinsbergen